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  • Photo du rédacteurMamzelle Cervelle

Les biais cognitifs : de l'UX à la diversité

Dernière mise à jour : 1 juil. 2019


Notre perception est biaisée par définition (photo par @laughayette)

Sommes-nous aussi “rationnels” que nous le pensons?

“Mais nan, y’a pas main là, y'a pas penalty...” Pourquoi est-ce aussi difficile de voir la faute commise par le sportif que l’on supporte? Avez vous déjà entendu parler des biais cognitifs et de la manière dont ils reflètent les limites de notre cher et tendre cerveau? Bien sûr, nous devons nous réjouir de les avoir car ils nous permettent d’économiser nos ressources cognitives et du temps lorsqu’il s’agit d’opérer, de décider, d’agir vite! Néanmoins, ils impactent tellement nos analyses au quotidien, qu’il est indispensable de les connaître toujours mieux.


En effet, une meilleure connaissance des biais cognitifs aide à une meilleure recherche utilisateur, à un meilleur design d’expérience, et même à une communication plus efficace. Et il se trouve qu’ils ont aussi toute leur importance sur des questions sociétales clés comme celles de la diversité!


C'est quoi un biais cognitif ?

Un biais est un modèle de pensée, ou d'évaluation qui s'opère de manière inconsciente et qui dévie de la réalité. Qu’il s’agisse d’une situation stressante, du besoin d’effectuer une tâche cognitive de manière très rapide, ou parce que nous sommes déjà occupés à accomplir une autre tâche cognitive, les biais rentrent en jeu pour nous donner une solution plus “simple”, rapidement, mais élaborée par des processus cognitifs irrationnels. Et parce que cette “solution” est issue des processus cognitifs inconscients, elle est bien déviée de la réalité.



Biais cognitifs et UX


Dans une démarche UX, aussi bien l’utilisateur que l’observateur, le designer, le directeur sont sujets aux biais cognitifs! Il en existe énormément, je vous propose d’en voir quelques uns et leurs impacts directs en UX.


Le framing


Le “framing” dérive de notre tendance à être impacté par la manière dont les choses nous sont présentées. Cela impacte la user research/recherche utilisateur et les communications en général. Le simple fait de rédiger ou de formaliser une question à un participant peut impacter la qualité des informations collectées! Par exemple, si la question est : “A quel point cet item vous satisfait? “, et bien rien qu’avec cette formulation, on part du principe que l’on a quelque chose d’a priori satisfaisant. Alors que ce n’est peut-être pas le cas, mais un participant recevant une telle question sera plus enclin à proposer une notation positive ou supérieure à la moyenne pour assouvir, même inconsciemment, le besoin de se référer à la notion de “satisfaisant”.

Pourtant formuler la question de la manière suivante : “comment noteriez vous l’expérience proposée? …” avec une proposition des scores, semble bien plus pertinent!

Et puis ensuite, les biais, comme les trains, peuvent en cacher un autre. Par exemple si lors d’un test d’Usabilité, on souhaite par exemple évaluer la manière dont l’interface était compréhensible par l’utilisateur, il arrive parfois que l’on demande “avez-vous compris?”, “avez-vous trouvé cela difficile?”. Ces questions renseignent, au mieux, uniquement la manière dont l’utilisateur perçoit la compréhension (facile ou difficile), mais en aucun cas ne peut révéler de manière fiable une compréhension effective. En effet, si l’utilisateur a mal compris en étant persuadé d’avoir compris il répondra qu’il a compris.

Par ailleurs, les biais sociaux pèsent largement lors de la recherche utilisateurs et typiquement, celui de désirabilité sociale (la tendance que l’on a d’agir pour paraître socialement meilleur) freinera un utilisateur, même inconsciemment, à exprimer un manque de compréhension!

Que fait-on dans ces cas-là? on neutralise le biais encore une fois en formulant la question de manière pertinente pour évaluer la compréhension : “selon vous, comment fait on pour…? que signifie cet icône?”, etc…


Pour beaucoup, les formulations deviennent donc un vrai casse-tête car le diable est dans les détails, mais de mon côté, j’adore ces puzzles! Mon biais de désirabilité sociale ne me fera pas nier que sur ces sujets je passe pour une “nolife” :p

Mais comme vous l’aurez compris, les protocoles expérimentaux requièrent une expertise qui permet de manier ces détails de formulation pour une qualité d’analyse sans laquelle on peut vraiment aller droit dans le mur…


En communication...

Evidemment, sans forcément le faire de manière aussi rationnelle, les biais sont largement utilisés en communication pour influencer l’évaluation que nous ferons d’une information. Comme avec ces yahourts, pour vanter une qualité pseudo-diététique.



Celui à 80% sans gras est attrayant non? et il s’agit pourtant du même produit. Comme quand on retrouve des produits avec “allégé en sucres”. Ok, super, merci, mais plus léger par rapport à quoi? Ben par rapport à ce qui fait que moi je ne suis pas allégée oui!...


Ces biais ont largement été étudié par le fameux Daniel Khaneman. Ce psychologue a eu le prix Nobel d’économie, c’est beau! Son livre Thinking Fast, Thinking Slow est un énorme succès et relate parfaitement des biais et la manière dont ils pèsent dans nos décisions.



Le biais d’autorité



Le biais d’autorité est un biais qui impacte aussi bien la User Research que le marketing. Ce biais provient de la valeur que l’on attribue à une information ou à une représentation en fonction de sa source. Par exemple, lors d’un test utilisateur, si on a un directeur en costard-cravate qui nous propose d’évaluer une expérience, et bien on aura tendance à penser que par sa présence, la qualité d’expérience sera particulièrement bonne. Il peut paraître donc plus crédible d’entrée. C’est notamment pour cela qu’il est préférable de faire tester des utilisateurs par des personnes qui gardent une neutralité par rapport à un projet ou vraiment formée sur ces biais.


C’est exactement ce même biais qui permet aussi d’attribuer de la crédibilité à un propos simplement parce qu’une personne porte une blouse pour nous vendre un dentifrice! C’est aussi cela qui rend possible la valeur de l’endorsement, ou le fait d’utiliser l’image d’une personnalité pour associer une marque, un produit ou un service à une valeur positive. Lorsque les marques de sport sont associés aux vainqueurs, elles paraissent plus performantes également.



Biais cognitifs et diversité


Malheureusement, les biais ont un impact ravageur sur la question de la diversité dans tous les milieux.

Le biais d’affinité, qui nous fait attribuer une plus grande valeur à ce qui nous ressemble est clairement responsable d’une homogénéité sidérante, en particulier dans les milieux professionnels.

Le biais inter-groupe en est très proche, et en favorisant donc la culture d’un groupe existant aux nouveaux entrants, il est difficile de diversifier le groupe. Cela met des barrières à des personnes qui ne sont pas encore dans des sphères de population de pouvoir.


Voici un TED talk et que je conseille vivement pour comprendre ce que sont les biais. Car en effet, sur les questions aussi essentielles et aussi sensibles de la diversité, il est important de comprendre qu’il ne s’agit pas de blâmer un être humain d’avoir des biais. Comme le dit très justement Kimmel en parlant de problèmes de diversité de genre ou de couleur "les privilèges sont souvent invisibles aux personnes qui en bénéficient" . J’ai autant de biais que vous, et c’est le propre de l’humain d’en avoir. En revanche, ce qui est important c’est de les connaître et de tendre à mieux en les connaissant.


"Mais comment connaître ses propres biais?" me direz-vous! Et bien si vous voulez vous surprendre tout en apprenant de vous-même, et en prenant un chemin pavé d’humilité et de progrès, je vous propose l’IAT Implicit Association Test d’Harvard (ou test d’association implicite). C’est un test qui permet de connaître ses biais. Il faut à la fois le faire de manière honnête, et aussi ne pas se juger bien ou mauvais suite aux résultats. Allez, faîtes le test, vos résultats vous appartiennent! Nos failles nous rend humains, mais c’est aussi en les connaissant que l’on s’élève!


Il y a plus d’une centaine de biais cognitifs, mais je ne suis pas personnellement convaincue que les énumérer tous permettent de vraiment travailler mieux en UX. En revanche, comprendre justement les systèmes en jeu dans les processus de perception et dans les prises de décision vous rendra selon moi bien plus apte à contourner ces biais, même si vous ne les nommerez pas tous! Bien évidemment, on parlera de ces systèmes prochainement :)

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