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  • Photo du rédacteurMamzelle Cervelle

La cyberchondrie : sommes-nous malades ?


Lorsque l’on croit avoir l’expérience de symptômes sans accès immédiat à un professionnel du corps médical, la tentation est immense : aller se concocter un petit diagnostic “fait maison” en allant sur internet. Malheureusement, ces recherches peuvent parfois devenir incessantes et anxiogènes. Sommes-nous tous atteints de cyberchondrie ? Comment y remédier ?

En cas de recherche d'informations de santé, les biais cognitifs peuvent nous emmener dans une spirale infernale. Nous allons pouvoir les décrire et grâce à une meilleure connaissance, aborder quelques astuces pour moins de cyberchondrie, et plus de sérénité dans la recherche d’informations médicales en ligne.



"As it turns out, everything was okay." by Owen Beard

C’est quoi la cyberchondrie ?


La cyberchondrie a d’abord été nommée pour la première fois au tout début des années 2000, et par des journalistes anglo-saxons. En effet, alors qu’une vague d’articles aux titres sensationnels s’en prenaient à internet, ce concept n’a d'abord pas concerné l’univers de la recherche scientifique. En revanche, plus d’une décennie plus tard, la cyberchondrie a été étudiée et mesurée grâce à l’établissement d’une échelle de sévérité de la cyberchondrie, la Cyberchondria Severity Scale (CSS). Aujourd’hui, il n’y a pas de consensus pour qualifier la cyberchondrie comme maladie à part entière. Par contre, on sait que le phénomène de cyberchondrie inclut la recherche excessive d’informations médicales en ligne qui sera associée à du stress et de l’anxiété, et que cela peut nuire aux autres sphères de la vie courante lorsque ces recherches ne s’arrêtent plus.


Quel est le rapport entre les biais cognitifs et la spirale anxiogène en cyberchondrie ?


Bien évidemment, lorsque l’on va chercher des renseignements médicaux sur internet alors que l’on a des symptômes, l’idée n’est pas seulement de savoir quoi faire, mais aussi de se rassurer. Mais, avec les mêmes symptômes, alors que certains peuvent se rassurer avec les résultats de leur recherche, d’autres peuvent se retrouver en stress total. Effectivement, le cerveau sera confronté aux obstacles suivants :


  • Volume d’information et charge cognitive : il est évident que le nombre de sources et d’informations directement ou indirectement lié à notre recherche pourra très vite dépasser notre capacité à l’assimiler, le sélectionner et l’organiser de manière logique pour en tirer une analyse pertinente. Donc, en plus d’un niveau initial de stress, cette saturation va booster nos biais cognitifs !


  • Le biais de négativité : bien entendu, puisque toutes les informations ne peuvent pas être retenues, le biais de négativité va jouer un rôle dans la mémorisation des informations. On aura donc tendance à se rappeler du pire plus que de diagnostiques bénins, pour une symptomatologie identique.


  • Illusion de vérité : une fois que l’on se rappelle du pire, comme il s’agit du pire, il faut se préparer. Donc que fait-on ? On creuse le concept évidemment ! Donc on va aller répéter son exposition au diagnostic le plus grave. Cela va renforcer notre inclinaison à adhérer à la thèse suivante : “ Oh non, mais c’est sûr que c’est ça ! C’est exactement moi !”, et là encore sans accès à un expert médical.


  • Biais de confirmation : une fois que la thèse d’un diagnostic grave est adoptée par le cerveau, il sera plus confortable pour ce dernier d’écarter les informations soutenant une hypothèse différente. Autrement dit, il deviendra encore plus difficile de lui faire entendre raison.



Les effets de la cyberchondrie


L’anxiété

Alors que les chercheurs associent la cyberchondrie à l’anxiété, la question de la directionnalité reste encore à préciser : est-ce l’anxiété qui conduit à la cyberchondrie, ou est-ce la cyberchondrie qui crée de l’anxiété ? Les effets pourraient être bidirectionnels.


Le lien avec le système de santé

Il serait difficile d’estimer le coût de la cyberchondrie sur le système de santé car il existerait plusieurs hypothèses. Tout d’abord, il y a la possibilité d’un recours accru aux services médicaux en raison de l’urgence provoquée par l’interprétation des informations trouvées en ligne. Mais il y aurait aussi un impact négatif sur la relation entre les professionnels et des patients cyberchondriaques qui viendront défier le diagnostic ou même les traitements recommandés par le corps médical.


Les fake news en santé

Malheureusement, les fake news sont loin d’épargner le monde médical. Comme on a pu le voir dans l’article à cet effet, les fake news peuvent être propulsées par quelques ‘influenceurs’ sans aucune expertise et la période de la pandémie de COVID-19 ne fait pas exception : en mars 2021, 12 influenceurs étaient derrière 73% des contenus complotistes et anti-vaccins publiés sur Facebook, Twitter et Instagram ! Ce type de fausses informations peut être inclus dans une recherche d’informations médicales en ligne et venir accroître la défiance des patients envers les professionnels.



Que faire ?


  • Attention au volume d’informations : il faut garder en tête que parfois, ce n’est pas en allant chercher encore plus d’informations que l’on va forcément trouver mieux et se rassurer. Le volume d’informations trouvées en ligne ne se transformera pas en diagnostic

  • Probablement le plus important, se diriger vers les professionnels : il est important de se référer à des praticiens, et parler à des professionnels de santé. Si les avis peuvent différer dans le corps médical, aller chercher plusieurs avis est une marche à suivre que beaucoup de patients peuvent faire pour avoir plus de précisions, et éventuellement comprendre les nuances entre des avis qui peuvent différer.

  • Apprendre à gérer l’incertitude dans des contextes inédits et complexes : il se peut que des connaissances soient nouvelles pour nous, comme pour le corps médical. Si ce dernier est capable de se remettre en cause suite à une meilleure connaissance, il faut savoir le reconnaître. Comme tout apprentissage, le fait de se mettre à jour et parfois de changer d’approche ne doit pas nécessairement être un argument pour dénigrer ni les compétences, ni les choix qui ont pu être faits auparavant. Le progrès implique toujours des changements, alors essayer de comprendre les raisons des changements au lieu de disqualifier des mises à jour semble raisonnable pour être plus éclairé sur les choix à faire personnellement.


Il semble donc tentant d’aller chercher de quoi se rassurer sur internet lorsque l’on a des symptômes. Les biais cognitifs peuvent encore nous jouer des tours mais quoiqu’il en soit, s’il s’agit de prendre des décisions importantes : la santé étant si précieuse, elle mérite bien aussi l’attention des professionnels pour nous aider à trancher.


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